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Son chapeau, criblé de balles, fut enlevé de sa tête. Plusieurs coups de baïonnette trouèrent ses habits.

Une lutte terrible s’engagea corps à corps.

Malheureusement les Français n’étaient qu’une quinzaine en tout. Après une résistance héroïque pour se maintenir, ils furent contraints de reculer ; mais ils reculaient, ainsi que font les lions, pas à pas, la face tournée vers l’ennemi, sans cesser de combattre.

Le comte rugissait, des larmes de rage inondaient ses joues de se voir ainsi abandonné, il voulait mourir ; vainement il se jetait au plus fort de la mêlée, ses deux amis le préservaient malgré lui des coups qui lui étaient adressés.

Enfin, la déroute commença ; le comte brisa son épée en jetant un regard de colère impuissante vers ces ennemis que, s’il avait été bravement soutenu, il aurait pu vaincre et qui lui échappaient.

Valentin et Curumilla l’entraînèrent vers le port.

Le navire qui l’avait amené avait appareillé pendant le combat ; la fuite était impossible.

Dans cette extrémité, une seule maison pouvait offrir un refuge aux vaincus. C’était celle de l’agent français ; les volontaires y coururent.

Le señor Pavo promit que tous ceux qui remettraient leurs armes entre ses mains seraient placés sous la protection du drapeau français.

Le comte était entré dans la maison et s’était jeté sur une chaise, insensible à tout ce qui se faisait et se disait autour de lui ; mais Valentin veillait.

— Un instant, dit-il, señor Pavo. Le comte de Prébois-Crancé aura-t-il la vie sauve ?