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— Venez-vous de la part du général, mon père ? lui demanda vivement le comte.

— Hélas ! non, monsieur le comte, répondit-il, le général ignore ma venue, s’il l’avait connue, il est probable qu’il aurait cherché à s’y opposer.

— Que voulez-vous dire ? parlez, au nom du ciel !

— Hélas ! je vais redoubler encore vos angoisses et votre douleur ; le général Guerrero n’a jamais eu l’intention de vous accorder la main de mademoiselle ; je ne puis vous rendre compte ni de ce que j’ai vu, ni de ce que j’ai entendu, mon ministère s’y oppose ; mais je suis Français, monsieur, c’est-à-dire votre compatriote, je crois que mon devoir m’ordonne de vous avertir que la trahison vous enveloppe de toutes parts et que le général cherche à endormir votre vigilance par de fallacieuses promesses afin de vous surprendre et d’en finir avec vous.

Don Luis baissa la tête sur sa poitrine.

— Alors, monsieur, dit-il au bout d’un instant, dans quel but êtes-vous venu ici ?

— Je vais vous le dire. Le général veut vous reprendre sa fille ; pour y parvenir, tous les moyens lui seront bons. Permettez-moi de vous faire observer que, dans les circonstances actuelles, la présence de mademoiselle est non-seulement un danger pour vous, mais encore une tache ineffaçable pour son honneur.

— Monsieur ! s’écria le comte.

— Daignez m’écouter, continua froidement le missionnaire ; je ne mets ici en doute ni votre honneur ni celui de mademoiselle ; mais vous n’avez pas, que je sache, la prétention d’imposer silence à vos