Page:Aimard, Auriac - Les Forestiers du Michigan.djvu/92

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
88
les drames du nouveau-monde



culéennes, prit l’aviron, s’en servit si adroitement et si vigoureusement que la barque bondit sur les flots, soulevée par ses bras d’acier. Enfin, chose inouïe ! Master Horace Johnson revint en droite ligne vers la rive où se trouvaient les sauvages.

En vérité, il fut heureux pour le repos mental de Basil Veghte qu’il n’eût pas vu ce spectacle étonnant et gros de mystère. L’honnête Forestier aurait été obligé de laisser ce problème non résolu, et de convenir que, comme les femmes, les hommes étaient des « choses bizzares. »

Ce qui prouva l’innocence de son âme et la bonté de son cœur, ce fut un remords de conscience auquel il s’empressa d’obtempérer. Veghte n’avait pas fait un quart de mille qu’il se prit à songer qu’il était un vrai lâche, un vrai Judas ! d’avoir ainsi abandonné son camarade : que si, d’un côté, le soin de sa préservation personnelle avait pu le solliciter dans le sens du départ ; d’un autre côté, l’honneur, la loyauté, lui commandaient impérieusement de revenir auprès de Johnson pour l’arracher aux mains de ses ravisseurs impitoyables.