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LES DRAMES DU NOUVEAU-MONDE

sa faible main de femme serait-elle assez ferme pour porter un coup mortel ?… Enfin, le ciel approuverait-il un pareil acte ?…

L’infortunée leva les yeux au ciel et lui adressa avec ferveur une courte prière.

— Oh ! Grand Esprit ! murmura-t-elle, inspirez-moi, fortifiez-moi !

Ensuite, se sentant raffermie par le même courage qui jadis anima Judith, elle leva l’arme meurtrière pour l’enfoncer dans la poitrine du Sauvage. À cet instant suprême, un simple mouvement de Wontum changea la face des choses : il lâcha le bras de Manonie qu’il tenait serré depuis quelques instants. La captive devenait libre de ses mouvements ; elle échappait à l’horrible nécessité de faire couler le sang : le couteau s’abaissa sans frapper.

Craignant de perdre une seconde, Manonie se leva doucement et prit son fils entre ses bras. Ses regards se portèrent anxieusement autour d’elle, pour chercher la route à suivre : tout était tranquille et muet. Elle se mit en marche, posant légèrement ses pieds entre les dormeurs. Pendant cette périlleuse et critique entreprise, son cœur battait si fort, que ses pulsations lui semblaient