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nier, il est plus simple, plus varié, plus vaste. Son esprit voit mieux l’ensemble, parce que son âme se voit mieux elle-même. En écrivant, Buffon songe surtout à ses lecteurs, Linné ne songe qu’à ses disciples : il enseigne ; Buffon peint, raconte et décrit. Le livre de Buffon est une magnifique galerie où chaque tableau nous apparaît dans son cadre, mais isolé des autres tableaux. Le livre de Linné n’isole rien, les objets s’y détachent sur un fonds immense qui les unit ; c’est la variété dans l’unité. On l’a blâmé de ses méthodes parce qu’elles renferment quelques erreurs, et l’on n’a pas remarqué que ces erreurs, qui se concentrent dans les détails de ses classifications, sont sans périls pour la science et sans révolte contre la religion. Les erreurs de Buffon ont plus de gravité ; il s’occupe d’abord de notre petit globe qu’il s’efforce de construire par la toute-puissance de sa seule imagination ; puis il y place les animaux qu’il tire du néant par la toute-puissance des molécules organiques ; puis enfin il y place l’homme, statue immobile qu’il anime et qu’il vivifie par la toute-puissance des doctrines de Locke, créant