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Et sous le ventre épais, masse de chair immonde
Qui cherche aveuglément des têtes à broyer,
Des hommes écrasés hurlent ! — L’un, beau guerrier,
(Est-ce un chef de la Grèce ou n’est-ce qu’un roi perse ?)
A dû choir à genoux et gît à la renverse,
Les jarrets repliés, les pieds collés aux reins.
Son dos est soulevé sur des tronçons d’airains ;
Sa bouche, sous le pied du cheval qui s’élance,
S’ouvre, et la mort l’emplit d’horreur et de silence !
Un autre, piétinant ce cadavre étendu,
Se courbe, non encor tombé, déjà perdu ;
D’autres aussi sont là ; fatigués de combattre,
Certains que ce cheval pesant les doit abattre,
Ils sont là presque droits, superbes et meurtris,
Lançant les derniers traits, poussant les derniers cris,
Sous le fardeau vivant vainement intrépides…
… Je vous retrouve encore ici, Cariatides !


VII



Mais regardons l’artiste au teint jaune : nerveux,
En sueur et le front couvert de ses cheveux,
Puget, maillet en main, façonne un bloc énorme
Qui lentement s’ébauche et par degrés prend forme.
Il taille en plein le marbre ; il frappe, et l’on entend
Ce bûcheron pousser un soupir haletant ;
Le marbre frissonnant s’étonne de sa force !
Un chêne jette au loin de longs éclats d’écorce,
Lorsque le bûcheron plante la hache au cœur :