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appuyé sa tête sur la poitrine du jeune gardian, et le diable, — qui est toujours là dès qu’on est deux, homme et femme, — avait conseillé le reste et en avait bien ri, aux dépens du bon Pastorel.

Alors avait commencé pour le gardian une vie de tourmente, de jalousie, de désespoir. Séparé de sa maîtresse par plus de sept lieues, retenu à Silve-Réal par sa besogne coutumière et par le désir de complaire le plus possible à sa vieille mère, il ne dormait plus, il ne vivait plus. Le breuvage qu’il avait goûté ne lui avait laissé que de la soif mêlée d’un goût précis, âpre, importun à la fois et désirable.

Ses camarades savaient où il allait, et ne se gênaient pas pour le plaisanter à l’occasion. On lui donnait à entendre que la belle « en avait d’autres » ; il le croyait et n’en voulait rien croire ; il en était sûr et ne voulait pas l’admettre ; il eût voulu que cela fût prouvé et ne cherchait pas à le savoir.