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MAURIN DES MAURES

ici la pluie ou, si vous voulez, comment et pourquoi on la déteste.

— Et, dit le préfet, que pensèrent les entrepreneurs de la conduite de leurs braves maçons ?

— L’entrepreneur, étant du pays, trouva la chose naturelle, mais mon ami Larroi, le Lyonnais, déclara qu’il n’acceptait pas cette façon de travailler, vu que si cela se renouvelait, sa villa ne serait pas construite avant dix ans (ce qui prouve que l’exagération n’est pas dans le caractère des seuls Méridionaux !) — et il exigea assez sottement que le maître-maçon lui envoyât d’autres ouvriers…

— Qu’arriva-t-il ensuite ? dit le préfet souriant.

— Ah ! vous voulez toute la suite de l’aventure ? Je vous préviens qu’elle s’est prolongée singulièrement.

— Allez toujours.

— Eh bien, il arriva une grève. Tous les maçons de la région abandonnèrent leurs travaux, il n’y eut bientôt plus assez de boules à Aiguebelle ni dans les communes environnantes, tous les grévistes de nos campagnes étant boulomanes.

— Et quels étaient leurs desiderata ?

— Voici. Le chef des grévistes, Darboux, alla trouver le patron :

« — Nous avons commencé la villa du Lyonnais, lui dit-il, c’est nous qui l’achèverons. Vouastré Lyouné ès un couyoun ; ùn home qui coumpren pas nouastré caratéro. (Votre Lyonnais est un… âne ; un homme qui ne comprend pas notre caratère.) Il ne peut pas, à cause d’une galégeade, ruiner le pays, voyons ! Ouvrez-lui la comprenure, à cet « étranger du dehors » !

« Darboux avait raison. Mais mon ami Larroi était un