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MAURIN DES MAURES

prix, l’heureux exposant, leur maître, apprenait par une indiscrétion de journal qu’il avait obtenu, grâce à eux, la grande médaille de 4 000 francs.

— Quand je vous l’avais dit, mon oncle !

— Mon neveu, dit l’oncle, les meilleures plaisanteries sont les plus courtes. Conduis-moi chez le président de la section des canards.

Le neveu protesta. L’oncle résista. Ils partirent.

Grâce à l’impertinence de Théodule, qui savait parler de haut aux bas employés, on les introduisit dans la salle même où siégeait le comité de l’Exposition.

La section des canards était en séance. Théodule alla dire quelques mots à l’oreille du président — qui n’était autre que le préfet en personne. Le préfet se leva aussitôt, très visiblement troublé, pria son comité de délibérer sans lui et entraîna Théodule et son oncle dans une salle voisine.

— Monsieur le préfet, commença le professeur idéaliste… mon neveu a dû vous expliquer d’un mot la situation. Elle est pénible. Je ne peux vraiment pas arracher à un éleveur sérieux, à un éleveur de carrière, un prix de pareille importance… Ces canards du Labrador n’en sont pas… et ma conscience…

— Il ne s’agit pas de cela, monsieur, interrompit sévèrement le préfet. Vous nous avez trompés, c’est entendu, mais, par suite, nous nous sommes trompés. Or notre erreur nous couvrirait de ridicule si votre conscience la dévoilait aujourd’hui. Votre devoir à présent est de vous taire.

— Mais, monsieur le préfet…

— Monsieur, dit le préfet, du ton d’un Bonaparte menaçant (ce ton-là est celui de tous les démocrates