Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/411

Cette page a été validée par deux contributeurs.
393
MAURIN DES MAURES

n’ai pas manqué mon coup !… Voyez un peu, sans fusil, ce que peut faire le génie de l’homme ! »

Quand il se releva, il aperçut ses quatre enfants et sa femme qui venaient à lui.

L’aîné de ses trois « drôles » portait le fusil ; sa petite dernière courait devant la mère. Tous avaient vu de loin les manières de Pitalugue, et ils avaient compris, les monstres ! Car un paysan aux champs voit tout ce qui se passe aussi loin que peut porter sa vue et, à la manière des mouvements d’un homme, il devine, au loin, si l’homme se gratte pour une puce ou pour une mouche.

Pitalugue cria à son aîné qui n’était plus beaucoup loin :

— Pitalugue, j’ai de la ficelle à la poche, va vite la prendre dans ma veste qui est pendue à l’olivier le plus proche.

Mais de la cordelette, Pitalugue fils en avait sur lui, et la lièvre fut liée par les quatre pattes, au milieu du rond que faisaient autour d’elle la femme, les quatre enfants et le père.

— Père, ne lui « fasse pas de mal ! » disait la petite en se haussant, pour voir ce grand lapin sauvage qui gigotait de son mieux, pechère, mais sans pouvoir se tirer de ce mauvais pas.

La lièvre liée, chacun voulut lui tâter le râble.

Seule, la petite ne caressait que le poil.

— Quelle lièvre ! Ça pèse bien huit livres !

— Ah ! çà, vaï, huit livres ! Elle en pèse au moins dix !

— S’il te fallait l’acheter, tu la paierais bien dans les sept, huit francs !