garer des projectiles de ses compatriotes. Heureusement, les pierres de la place étaient de petits cailloux. Pas moins Maurin s’était, à deux ou trois reprises, senti frappé rudement à la tête et sur les mains. Son sang coulait.
Déjà une rumeur circulait dans tout le village : « On se bat sur la place publique ! Aux armes, citoyens ! » Les gens sortaient des maisons, et bientôt le maire en personne apparut, ceint de son écharpe et suivi d’un garde coiffé du képi, la plaque sur la poitrine. Le malheur voulut que le maire, — un Lucquois établi à Gonfaron et en fonctions depuis peu de temps, comme successeur d’un maire récemment décédé, lequel était un ami de Maurin, — ne connut pas le braconnier. Au lieu de prendre le roi des Maures par la politesse et la douceur, ce qui sans doute aurait réussi, il l’apostropha de haut :
— Hé ! l’homme ! je calcule que vous feriez bien de quitter la place et sans regarder en arrière !
Maurin n’y put tenir et tout d’un trait riposta :
— Je vois à votre écharpe, que c’est vous qui avez, quand on a gonflé l’âne, déviré le tuyau !
— Arrêtez-moi cet insolent ! cria le tyran de village en se tournant vers son garde.
Le garde s’apprêta à obéir.
— Si tu touches au roi des Maures, dit Maurin, tu m’en diras des nouvelles !
Le garde s’était arrêté, comme changé en statue de sel.
La magie du nom fameux avait opéré sur lui, mais non sur le maire qui était un peu dévot et à qui on avait conté l’histoire de saint Martin ; il cria :