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MAURIN DES MAURES

les plus grands services en de certaines occasions.

Quand on disait, chez les paysans, sur un point quelconque du département : « Maurin… » quelqu’un de l’assistance aussitôt ajoutait, sur le ton de l’interrogation : « Des Maures ? » Et si celui qui allait parler répondait : « Oui », vite les têtes se rapprochaient, on faisait cercle pour apprendre quelque nouvelle aventure du roi des Maures, du don Juan des Bois.

Les domaines de Maurin étant immenses, on l’apercevait peu de temps dans la même région. C’est pourquoi, ce soir-là, à l’auberge des Campaux, la curiosité était si vive autour de lui.

Les joueurs oublièrent leurs cartes, pour le regarder attentivement. Les conversations étaient en déroute.

Maurin eut de nouveau un gros rire.

— Je suis tombé ici, dit-il, comme une pierre dans un marais, donc ! que les grenouilles ne disent plus rien ?

Le beau gendarme grommela sottement :

— Grenouilles ! grenouilles ! parlez pour vous, camarade !

Il ne fallait jamais agacer Maurin. Il avait la superbe d’un chef, et la susceptibilité d’un solitaire que rien ne vient heurter à l’ordinaire.

De plus, en présence d’une femme qui ne lui déplaisait pas, jamais Maurin n’eût « laissé le dernier » (le dernier mot) à qui que ce fût. En pareil cas, ce mâle devenait terrible, à la manière de tous les fauves.

— J’ai dit : « grenouilles » ! gronda Maurin, vous faisiez dans cette salle un tapage de grenouilles ! et vous vous taisez comme des grenouilles dans le marais, depuis que j’ai fermé cette porte. Je l’ai fermée pas pour