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MAURIN DES MAURES

darme Sandri ! Elle se mettait sous sa protection ! Elle le regardait comme un sauveur en ce moment.

Maurin sentit dans son cœur un violent mouvement de fierté et de joie. Prendre à Sandri sa fiancée, — sans mauvaise ruse, bien entendu, — c’était bien là un triomphe digne du don Juan des Maures, et qu’il espérait depuis quelque temps avec une impatience secrète, et dont il s’étonnait.

— Qu’y a-t-il, ma belle petite ? demanda-t-il.

Malgré la force de son impatience, le don Juan des Maures était un mâle trop énergique, trop sûr de lui-même et trop fier, pour jamais essayer de triompher d’une femme par des moyens sournois.

Sa grande satisfaction était de voir les femmes « venir toutes seules », comme il se plaisait à le dire, telles les perdrix au coq. Chacun sait qu’il avait un jour répondu à un curieux, qui l’interrogeait sur ses moyens de séduction :

— Oh ! moi, les femmes, que vous dirai-je ? Je les regarde comme ça et elles tombent comme des mouches !

À la façon des Maures ses aïeux, il aimait les femmes un peu comme de gentils animaux familiers qui doivent servir attentivement leur maître, l’homme, pour être vraiment aimables. Il les aimait dédaigneusement. Et l’inconscient désir qu’elles avaient de vaincre ce dédain n’était pas pour peu de chose dans les passions qu’il inspirait.

Il y a encore quelques vieilles maisons de paysans, en Provence, où la femme ne se met pas à table à l’heure des repas. Elle sert les hommes, même ses fils, et ne s’attable qu’ensuite.

On n’ignore pas que les Arabes, voyageant à cheval