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MAURIN DES MAURES

et tu seras forcé de me le rendre, — que j’y tiens beaucoup !

— C’est toi qui as tué l’homme ! dit d’une voix sourde et décidée le charbonnier redoutable.

Maurin haussa les épaules et porta son index à son front.

— Tu déménages, Grondard, dit-il d’un ton apitoyé. Voyez-moi un peu ça !… Tu as rencontré un bouton de ma veste dans le bois, et tu prétends en conséquence que j’ai tué l’homme. En voilà, un raisonnement ! Si tu avais cherché mieux, tu aurais trouvé par là, pas loin du bouton, je pense, du poil de renard ou de la plume de perdreau. Grâce à Dieu, il n’y a pas un coin des Maures où je n’ai tué quelque chose. Et puis sais-tu depuis combien de temps j’ai perdu mon bouton de cuivre ? Depuis l’été passé, collègue !… Ainsi, fiche-moi la paix. Les chiens là-haut, entends-les, sont sur la piste. Je ne veux pas manquer cette lièvre. Allons, fais ta route que tu me gênes ; file, que je dis ! Laisse-moi libre de ma chasse. Et conserve bien le bouton, qu’il faudra bien, un jour, que tu me le rendes !

Grondard n’entendait pas de cette oreille. Il exécutait un plan. Il secoua la tête. Il voulait exaspérer Maurin, comptant que le chasseur, dans sa colère, laisserait échapper quelque semblant d’aveu. Sandri sans doute n’était pas loin de là.

— Ce n’est pas tout, Maurin, affirma effrontément Célestin changeant ses batteries.

— Qu’y a-t-il encore ?

— Tu as un jour surpris ma sœur dans le bois !… je le sais ! Chaussé de souliers de corde comme toujours tu es, tu t’es avancé sans bruit et tu l’as surprise…