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MAURIN DES MAURES

CHAPITRE XIX


Où apparaît, pour le grand ennui de Maurin et la plus grande satisfaction de la gendarmerie nationale, un nouveau personnage noir comme un diable.


Grondard était charbonnier. Il habitait avec sa famille, à travers les Maures, une sorte de hameau formé de cinq ou six cabanes qu’il allait construisant, démolissant et reconstruisant sur tous les emplacements où on l’appelait, des divers points de la montagne, pour faire du charbon.

Sa famille se composait de quatre filles de douze à dix-neuf ans et d’un fils de vingt ans, Célestin Grondard, qui était, comme son père, un mauvais géant.

Grondard le père était un colosse, à la face et aux mains toujours noires de charbon. Cet horrible athlète avait des mœurs dignes des anciens dieux de Rome et de la Grèce. En disant : « c’est un véritable Œdipe », le percepteur l’avait flatté. Œdipe est une conscience. Les crimes d’Œdipe furent involontaires. Œdipe adore son Antigone.

Le curé et le notaire avaient mieux jugé Grondard en l’appelant l’un : l’Ogre et l’autre : Caliban. En quoi ils étaient d’accord avec le jugement populaire qui nommait Grondard la Besti (la Bête).

Aux sauvages forêts des Maures, Grondard était ce que le rôdeur de barrières est aux fortifications de