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MAURIN DES MAURES

largeur de mon dos cachait à vos yeux de chair l’objet de votre espérance !… »

« Et du doigt il désignait un joli petit enfant d’ânesse, rondelet, à l’œil vif, à l’air spirituel, qui, attaché par une corde au pied d’un olivier, broutait le chiendent et la lavande, dans la restanque, au bord du sentier pierrailleux.

— Sainte Vierge du ciel, soyez remerciée ! Saints anges du Paradis, soyez loués dans les siècles des siècles ! Dieu n’a pas voulu la mort du pécheur ! s’écria Pancrace.

« Et en un tour de main, soulevant les deux sacs rebondis, après les avoir reliés entre eux au moyen d’une cordelette, Panuce et Pancrace les arrimèrent sur l’échine de l’âne, l’un pendant à gauche et l’autre à droite. Quand cela fut fait, les deux moines burent un coup de clairet à la gourde qu’ils portaient dans leur capuchon, à la façon des Sarrazinois, et s’épongeant le front avec leur grand mouchoir de cotonnade à carreaux multicolores, ils s’assirent un moment au pied de l’olivier, sous l’ombre chaude et claire ; et ils admiraient l’âne, et ils le bénissaient du fond de leur cœur comme un envoyé de la sainte Providence qui, enfin, avait pris en pitié leur grande lassitude.

— Mais, dit Pancrace, frappé d’une idée et inquiet tout à coup, il n’y a pas, dans ce triste monde, il n’y a pas, que je sache, un seul âne sans maître ?

— Tout peut arriver, par la permission du ciel, dit Panuce ; des ânes sans maître, on en voit rarement, dans ce monde de misère, je ne le sais que trop ; on n’en voit presque jamais, je vous le concède ; mais qu’il ne puisse y en avoir, je n’en jurerais pas.