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Souffle étrange ! parfum qui trouble ! souvenir !
Toujours et malgré tout tu pénètres mon âme,
Et tu me fais chanter, et tu me fais souffrir,
Souvenir ! nom cruel, doux comme un nom de femme !

J’ai tout quitté ! ma sœur, mes flots et mon soleil !
J’ai quitté la nature ardente de Provence,
Quitté mon fier pays ignorant du sommeil,
Qui moissonne sans trêve et sans trêve ensemence !

Tu ne me tendras plus, ma sœur, tes douces mains ;
Je suis seul maintenant ! je vais tête baissée,
Et je saigne de voir le peuple des humains
Oublier les hauteurs calmes de la Pensée.

C’est fini. Je suis là, morne. J’ai tout quitté !
J’ai fui ! Je suis parti sans regarder derrière !…
Elle n’est plus à moi, la bleue immensité
Tressaillant de bonheur, d’amour et de lumière !