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L’ILLUSTRE MAURIN

— L’édition ! dit Labarterie, intelligent et explicatif.

— Quand j’ai puis bien çosi, continua Marlusse, ze prends le premier venu et je dis comme ça au libraire : « Combien ? » Celui-là me répond : « C’est tant. » Z’envoie la main à la posse, et je lui donne tant.

Marlusse, ce disant, faisait le geste de prendre de la monnaie dans son gousset et de la compter attentivement dans la main du libraire.

— Et pendant que ze le paie, il m’aregarde bien et me dit tout en coup, il me dit comme ça, dit :

« — Vous, vous êtes de Bandol ! »

« Oh ! noum dé pas Dìou ! je restai là, moi !

Et Marlusse, la main ouverte comme pour faire un pied de nez, se planta le pouce sous le menton. Cela signifiait le crochet où se prend la tête étonnée d’une morue tirée du fond de son élément par un pêcheur de Terre-Neuve.

— Eh ! que ze lui dis, comment que vous le savez ?

« Il se mit à rire.

« — Vé ! » que ze lui dis…

Et Marlusse mettait le bout de son index sous son œil droit, dont il tirait la paupière inférieure, ce qui signifie partout : « J’ai l’œil ! vous ne me tromperez pas ! »

— Vé, que je lui dis, ou Novarre, ou M. le maire, ou Soufflarès, l’un ou l’otre est ici, cacé dans votre boutigue, et il vous a dit de me dire ça. Vous ne l’avez pas devigné !…

« Alors, messiés, pour cercer mes collègues de voyaze, je lui dévirai tout dans sa boutigue, qu’il en riait comme un bossu… Eh bien !… il n’y avait personne de cacé. Alors, ze lui dis comme ça :