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L’ILLUSTRE MAURIN

CHAPITRE VI


Le grand électeur Maurin prépare les élections.


Pour venir à pareille réunion, Maurin avait fait un brin de toilette. Il portait sa moins vieille veste, qui semblait neuve. Sa chemise molle était bien propre et ses souliers « pour aller en ville » avaient été nettoyés de sa main. À travers sa barbe sarrasine, naturellement rare, courte et frisottée, on pouvait suivre la ligne noble de son menton et de ses joues. Ses mains, qui depuis des années ne maniaient guère que le fusil, étaient sèches et nullement lourdes. Tel, la taille bien prise, le regard ouvert et intelligent, il plaisait à la Parisienne, grande lectrice de livres galants… Ce ne serait pas la première fois que des princesses aimeraient des bergers… Maurin, qui avait quelques raisons de penser de la sorte, fut son voisin à table et ne se gêna guère pour la regarder trop aimablement.

— À Maurin les honneurs, dit Cigalous levant son verre.

— Aux dames tout honneur ! dit Maurin.

On se saluait de temps en temps et l’on buvait du vin de San-Clar.

Halbran, son tablier relevé, sa casquette aplatie sur le front, un peu gros et réjoui, avait consenti à mettre en poche sa pipe de terre, culottée depuis quinze ans ;