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L’ILLUSTRE MAURIN

derrière toi et si la porte vient à s’ouvrir, tu y entreras par le dos, pour peu que tu continues à reculer… Eh ! eh ! touché !… Té, j’ai une idée : je vais te mettre à la poste ! Je t’aplatis comme une lettre et, pan ! voilà le timbre ! je te l’ai collé au mitan du cœur… Mort !

Maurin abaissa son épée. L’autre, abasourdi, s’épongeait le front.

— À présent, lui dit Maurin, selon qu’entre vous autres, messiès, il est d’usage en pareil cas, tu viendras dîner avec moi. Sans ça, où dînerais-tu ?

Cabissol s’approcha du jeune Caboufigue et causa un instant à voix basse avec lui… « Cette affaire était ridicule. On l’étoufferait mieux ainsi. Il fallait laisser croire aux assistants que c’était une plaisanterie… Où dînerait-il d’ailleurs ?

— Il n’y a qu’un hôtel. Il vaut mieux faire table commune. Serrez-lui la main, au roi des Maures ! et riez. Vous n’êtes qu’un enfant auprès de lui. La foule croira à un jeu… et, au bout du compte, ce n’est pas autre chose.

Caboufigue le fils comprit qu’il n’avait rien de mieux à faire, en quoi il montra enfin de l’esprit.

— Touchons-nous la main, Maurin, dit-il. Vous êtes, je le sais, un vieil ami de mon père… Je me déclare mort, et j’ai grand appétit. Allons déjeuner.

La chose fut bien dite, en belle humeur. Caboufigue le fils avait songé tout à coup que si ces bâtons eussent été des épées, il serait en ce moment hors d’état de déjeuner ; et n’étant pas méchant garçon, il se conduisit comme un gentilhomme qui, vaincu, consent à tendre la main à un adversaire généreux.

À votre place, lui dit M. Rinal gravement et finement, j’aurais fait comme vous.