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L’ILLUSTRE MAURIN

Provençaux, nous ne croyons pas vite aux actions terribles… notre ciel est trop bleu, trop gai… mais une fois partis, nous pouvons égaler les plus énergiques.

« — Si c’est pour de bon, dit gravement le fédéré, alors, permettez-moi de dire adieu à mon fils.

« — Où est-il ?

« — Dans mon cabinet de commissaire spécial. »

« On alla chercher le fils aîné, jeune homme de vingt ans, qui m’a lui-même conté la fin héroïque de son père.

« — Fils, lui dit-il, celle-là est forte ! il paraît, qu’on va me fusiller. J’ai cru d’abord que c’était pour galéger, mais ça va de bon ; alors, embrasse-moi… Té, voici ma montre en souvenir… Vive la République, feu ! »

« Et l’homme tomba, percé de balles.

« Il ne voulait que vivre — et il sut mourir, voilà. Voyez vous, monsieur Labarterie, il y a temps pour tout.

— Monsieur, dit Labarterie ému, je vous fais mes excuses, j’ai compris.

Maurin s’essuyait le coin des yeux.

— Va la ben éspliqua ! bougramen ben ! il le lui a bougrement bien expliqué ! dit Mascurel.

— Il le lui a expliqué bougrement bien ; bien expliqué il le lui a ! confirma Lacroustade. Si les Parisiens se foutent de nous, nous nous foutons d’eux ! Si de nous ils se foutent, les Parisiens, d’eux nous nous foutons, coin ! coin !

— Té ! dit tout à coup Maurin, j’aperçois une belle voiture ! Ça doit être un de nos darnagas (pies-grièches), Caboufigue père ou fils.

— Es uno Voituro dé gro moussu ! C’est une voiture de gros monsieur, dit Mascurel. Me semble que je le connais, celui qui est dedans ; mi semblo que lou counouissi, aquèou qu’ès dédins.