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L’ILLUSTRE MAURIN

« esconjure-la ». Pour les chiens, pas besoin de signe. Et les paroles, les voici :

C’est le chien noir de la montagne
Qui va tournant dans la campagne,
Le nez soufflant, la bouche en feu,
Et la langue aboyant à Dieu.

— Je le reconnais, dit Maurin, je le reconnais !

Et dans sa pensée trouble de fiévreux, il vit Tonia transformée en chienne hurlante… Mais non… c’était la Fanfarnette.

Trestournel continuait :

Mais si Dieu veut que je l’arrête,
Je mettrai le pied sur sa tête ;
Dieu le voudra si je le veux,
Car sa lumière est dans mes yeux.
Il le voudra, si je l’en prie
Au nom de madame Marie
Qui porte son petit enfant,
Droite sur le front du serpent.
Viens ici, grand chien de la haine !
Dieu garde mes bêtes à laine !
Abaisse ta férocité
Devant l’agneau d’humilité.
Le vent élève ma prière
Mais il n’éteint pas ma lumière…
Gaspard, Balthazar, Melchior…
Je marche avec l’étoile d’or !

— Avec tout ça, je voudrais bien savoir, s’écria tout à coup Pognon, comment sortir d’ici ! Voilà, vieux, ce qu’il faut que tu nous dises.

— Si tu ne te désires pas ta géhenne à toi-même, si tu n’es pas damné par toi-même, j’ai un secret pour toi. Mais si tu te damnes de ta volonté, tu oublieras mes paroles et dans ton enfer tu resteras.

De sa voix basse, basse, voix de vieillesse lointaine, déjà descendante dans la tombe où dorment les temps, le vieux mage dit :