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L’ILLUSTRE MAURIN

inquiets, souvent blâmés des autres lorsqu’ils se cachaient mal, car une lueur de pipe pouvait dénoncer toute la bande aux passants de la plaine ou aux gendarmes.

On causait, on regardait l’espace ouvert devant cette bouche de grotte où, libre, entrait parfois une chauve-souris familière.

Pognon disait :

— Galette, quand nous évaderons-nous de cette liberté-ci ?

Pognon répondait :

— Quand j’aurai de la galette.

Galette répondait :

— Quand j’aurai du pognon !

Et ils riaient, douloureux et stupides.

On se racontait des aventures de bagne, des histoires à faire frémir, où l’on voyait des gardes-chiourmes renversés par des forçats et tués à coups de botte, des forçats tués par des gardes-chiourmes à coups de revolver et piétinés ensuite férocement ; et c’était toujours des évasions extraordinaires, inadmissibles et pourtant véritables.

Et les aventures contées aujourd’hui, on se les redisait demain, et encore, encore, indéfiniment.

— Pourquoi, dit Maurin, prenez-vous plaisir à raconter de ces affreuses histoires ? Il y en a tant qui sont belles.

— Les belles histoires, dit Galette, ne nous intéressent pas : elles ne parlent pas des gens comme nous.

— J’en sais une, répliqua Maurin, qui est l’histoire d’un voleur, et elle fait honneur aussi bien à lui qu’à l’homme qu’il avait volé.