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L’ILLUSTRE MAURIN

ballots de tabac dans la grotte, des cordes descendirent du faîte de la colline jusqu’à terre. On y attacha une chaise où Maurin fut assis avec les plus grandes précautions. En grand silence il fut monté ainsi dans la grotte où Pastouré, au milieu des contrebandiers, lui fit accueil. Deux hommes crochèrent les cordes de la chaise au moyen de deux gaffes et l’attirèrent à eux.

Maurin fut étendu sur deux matelas qu’on lui avait préparés, le long d’une des parois de côté, dans un creux de la roche qui formait une manière d’alcôve.

— À présent, dit Pastouré, toutes les gendarmeries peuvent fouiller toute la France sans t’y trouver. Enfin nous voilà tranquilles !… Tu n’as plus qu’à guérir.

— N’as-tu pas remarqué tout à l’heure encore, dit Maurin soucieux, que, sur la grand’route, au soleil trémont, les gens ne se disent plus : « Bonsoir, bonsoir, » comme faisaient nos pères ? C’était pourtant une gente habitude. Et comment se fait-il qu’elle se perde, si, comme on le raconte, les hommes deviennent moins sauvages par l’effet du temps ?

— Trop de mécaniques ! dit Pastouré haussant les épaules ; leurs voitures mécaniques mettent tout le monde sur les routes ; ça ferait trop de bonsoir, bonsoir… Mais tais-toi ; M. Rinal m’a donné les instructions pour te soigner et te panser jusqu’au jour où il viendra. Fais silence et dors… il faut que tu guérisses, il le faut, car, vois-tu, j’en suis fâché pour le peuple, mais il n’y a qu’un Maurin.

Dans la grotte, ils n’étaient éclairés que par la lune large et tranquille dont le reflet faisait là-bas, sur la mer d’un noir bleuâtre, comme un chemin de lumière.