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L’ILLUSTRE MAURIN

rin, que je voie si vous serez content de sa réponse.

— Quel est le plus bel idéal et le plus réalisable ? — demanda le vieux professeur à l’enfant. — Le sais-tu ? Nous en avons parlé souvent.

— C’est, dit Bernard, que partout le plus fort doit aide et protection au plus faible.

Hélas ! M. Rinal inculquait au petit Maurin la folie de don Quichotte, ce mal étrange qui seul rend la vie supportable.

— J’ai toujours pensé ça, sans savoir le dire, fit Maurin… Étudie, petit… Adieu, Maurin, adieu.

On emmena l’enfant. Alors, Maurin dit à M. Rinal :

— Le plus fort, — voyez-vous, monsieur Rinal, — sera toujours le plus injuste. Et le plus faible ne demande qu’à le remplacer pour avoir la force à sa place et l’injustice à son profit ! Les pauvres sont socialistes parce qu’ils sont pauvres ; ils ont cette opinion par intérêt, monsieur Rinal, par égoïsme ; chacun pour soi ! mais quand un bourgeois qui ne demande rien au peuple est comme vous socialiste, c’est seulement par l’effet de sa bonté, puisqu’il n’y a pas d’intérêt… au contraire. Et voilà pourquoi je vous aime… mais les bourgeois comme vous, on les compte, vous savez !

— Allons, allons, fit M. Rinal, ne vous exaltez pas.

— Eh bien, répliqua Maurin après un silence, rendez-moi le service, Monsieur Rinal, de faire venir ici, par les soins de M. Cigalous, un de mes amis de Bormes, appelé Verdoulet, pourquoi j’ai à lui parler en particulier… ça me fera du bien.

— Je vais le chercher, dit M. Cabissol qui entrait.

Verdoulet vint voir Maurin le soir même. On les laissa ensemble.