Page:Aicard - L’Illustre Maurin, 1908.djvu/493

Cette page a été validée par deux contributeurs.
475
L’ILLUSTRE MAURIN

Elle se mit à sangloter en silence :

— Pardonne-moi, Maurin !

— Eh bé, oui, pardi, que je te pardonne ! ce qui est dans notre destin ne nous aregarde pas… je devais mourir de cette manière !

— Mourir ! Mourir ! cria Tonia éperdue ! ne meurs pas, mon Maurin, mon homme ! je serai tienne comme tu voudras… Ce que tu voudras, je le dirai, je le ferai, — je le serai.

— Il est un peu tard ! dit Maurin doucement.

— Oh ! par pitié ! pardonne-moi, gémit Tonia.

Et elle se pencha, lui prit la tête à deux mains et l’embrassa à pleines lèvres, sur le front, sur les joues… sur les lèvres.

— Brigand de sort ! dit-il, tu es une belle fille et tu m’aimais, je le vois, mais ça fait bougrement mal !

Là-dessus il s’évanouit de nouveau.

Quand il revint à lui :

— À présent, dit-il lentement et par petites phrases courtes, mon compte est bon… Comment vas-tu faire ? Il faut me tirer d’ici… Il faut prévenir des amis, ils feront ce qu’il faudra… Il faut quatre hommes au moins… et qu’on ne sache rien… je dirai que mon fusil est parti tout seul… brûle une cartouche… bon. À présent, va-t’en… Ça sera dur, la nuit. Je calcule qu’avant le jour tu ne peux pas être ici…

Elle retira son cotillon, lui en enveloppa les jambes, mit son foulard autour de son cou, fixa son feutre sur sa tête, mit la gourde auprès de lui, l’arrangea enfin pour le mieux. Au-dessus de sa tête elle fit un toit de branchages.

— Tu m’as pardonné, Maurin ?…