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L’ILLUSTRE MAURIN

bien lui !… Je te tiens, bandit !… Ah ! si je voulais, mais je ne veux pas !… Ah ! si je t’avais vu avec elle, comme, — alors, — je t’aurais tué !… avec elle ! avec la Fanfarnette ou même avec tout autre, mais avec celle-là surtout, avec celle-là que tu as cherchée, cherchée et prise malgré elle, lâche, voleur ! traître, voleur et lâche !… »

Maurin, là-bas, fit un mouvement. Il allait disparaître… Quand elle ne le vit plus, malgré elle à la fois et volontairement, par l’effet d’une succession si rapide de vouloir et de non-vouloir que les deux étaient mêlés, elle pressa la détente… Il ne lui semblait d’ailleurs plus qu’elle tirât sur Maurin, puisqu’elle ne l’apercevait plus… Il sentirait du moins siffler la balle. Il s’en souviendrait ! Et puis, comme elle ne le voyait plus, elle n’éprouvait plus que la haine… Et enfin, elle était bien sûre de le manquer, quoique, — si elle eût eu le pouvoir de faire les choses à sa guise, — elle eût voulu le frapper, le blesser, non pas dangereusement sans doute, non pas pour qu’il mourût, mais pour le punir… cruellement… à la manière corse !… Oh ! voir son sang !… et puis, s’il en mourait, après tout, pourquoi pas ?… il la faisait trop souffrir, à la fin ; il l’humiliait bien trop !…

Et son doigt convulsif avait pressé la détente. Maurin, invisible, mais qui, de là-haut, regardait dans la direction de Tonia, vit le nuage rond d’une fumée s’élever au-dessus des broussailles qui lui cachaient sa sauvage amoureuse, et aussitôt, une balle dans la poitrine, il s’affaissa, en silence, comme un sanglier…