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L’ILLUSTRE MAURIN

Conte-lui comment, de vrai, il t’a prise de force et ensuite promis le mariage.

— Soyez tranquille, je ferai tout comme vous m’avez dit.

Grondard regagna sa bauge.

La mignonnette bergère déjeuna gentiment. Plusieurs de ses chèvres, qui étaient familières, vinrent manger du sel dans sa main.

Quand elle eut déjeuné, elle s’amusa à tresser des couronnes avec des feuillages. Elle se les posait sur la tête et se regardait dans son petit miroir. Et puis avec des branchettes de romarin elle se fit une cage à cigales, et tout en travaillant elle chantait à tue-tête :

 
« Fille, tu te veux marier ?
N’ai point d’argent à te donner.
— Qu’est cela l’argent ? Qu’est-ce que l’argent ?
Emprunterons à nos parents !
L’Antoine,
Je le veux…
Mariez-moi au bout de l’an :
Je ne peux plus espérer tant. »

« Fille, tu te veux marier ?
N’ai point de lit à te donner.
— Qu’est cela un lit ? Pas besoin de lit !
Se coucherons dans l’escalier…
L’Antoine,
Je le veux…
Mariez-moi au bout de l’an :
Je ne veux plus espérer tant. »

Elle pensa que Tonia pourrait l’entendre et, très bas entre ses dents, fredonna une autre chanson :

 
« Qui te suivait à la fontaine,
Morbleu, Marion ?
— C’était une femme qui lavait,
Mon Dieu, mon ami !