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L’ILLUSTRE MAURIN

— Viens me prendre ! dit Maurin, qui baigna l’un après l’autre dans un seau ses pieds chaussés d’espadrilles… Puis, écrasant plusieurs fois sur sa tête avec sa main droite son torchon ruisselant, trempé coup sur coup dans le seau qu’il portait de sa main gauche, il entra, par le chemin creux, sous la voûte formée de flammes ronflantes. Il s’engouffrait dans la fournaise par un portique de feu.

On entendit ce cri de Pastouré qui intrépidement le suivait avec les mêmes manœuvres :

— Couquin dé pas Dĭou ! qué căou, moun ami !

Sandri n’en crut pas ses yeux. « Ce sont deux hommes morts ! » pensa-t-il. Les soldats revinrent bredouille.

Le préfet fut étonné… Personne ne comprenait.

— Serait-ce un suicide ? dit avec insistance M. Cabissol. Un suicide double ! Pauvre Maurin ! on l’a affolé…

M. Cabissol pensait avec raison servir Maurin en accréditant l’hypothèse du suicide…

Toutes les issues du cercle immense dévasté par le feu furent rigoureusement gardées.

De Toulon, on avait appelé de nouveaux bataillons de ligne. Un cordon infranchissable de soldats veillait sur l’infranchissable bordure du champ d’incendie mal éteint.

— Je savais bien, disait Sandri, que, d’une manière ou d’une autre, je débarrasserais les Maures de ce brigand-là !… Nous le trouverons à la fin, que diable !… rôti comme un sanglier, noir comme un charbon, cuit et recuit, bien cuit… On va donc pouvoir respirer tranquille !…