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L’ILLUSTRE MAURIN

figue, dès qu’il a aperçu le mouvement du chasseur, s’est suspendu par les pattes à une branchette, la tête en bas, et, la tête bien repliée sous l’aile, entre deux figues, il a tout à fait l’air d’en être une troisième ! Le chasseur aussitôt sort de son poste, le fusil en main, les yeux toujours fixés sur la branchette où il a vu l’oiseau se poser… « Il n’est pas parti, j’en suis sûr ! où est-il, alors, ce sorcier ?… rien ne bouge ! » Une fois près du figuier, l’homme oublie qu’il tient un fusil… il pense que décidément il s’est trompé… que l’oiseau s’est envolé… Il y renonce, il n’y pense plus, et voyant, juste sur la branchette, qu’il n’a pas cessé de regarder avec tous ses yeux, la plus belle des figues à la place de son oiseau, il envoie la main… frrutt ! l’oiseau part en lui lâchant au nez, comme de juste, une petite crotte !

— C’est sans doute de là, dit M. Cabissol, qu’est venue l’expression : « Faire la figue à quelqu’un », se moquer de lui.

— Possible ! dit Maurin se bourrant de melon à la barbe du juge… Ce qui est sûr, c’est qu’il ne faut pas trop mépriser la chasse au poste, car elle a son mérite, vu qu’il y a encore d’autres oiseaux sorciers qui la rendent beaucoup difficile. Nous avons le vire-pierre, qui se cache derrière une pierre et qui tourne autour tout le temps, de manière qu’elle reste toujours entre le chasseur et lui ; il y a le trompe-la-mort, qui fait le mort, couché sur le dos, pour que, au lieu de le tirer, le chasseur sans méfiance aille le ramasser avec la main, et à ce moment, frrutt ! bonjour, nigaud !… Il y avait autrefois, du temps des fusils à pierre, le cague-bassinet et il venait déposer sa petite chose humide, sortie du