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L’ILLUSTRE MAURIN

jugée un mois après, on la condamne à la prison et à l’amende. Que dites-vous de ça ? je dis, moi que c’est elle qui est volée.

Il s’anima, en poursuivant :

— Vous lui avez pris vingt-cinq jours de son travail, mossieu ! Vingt-cinq jours, nom de pas Dieu ! c’est une fortune que personne ne peut rendre à personne ! Vingt-cinq jours que je ne vous dois pas, tas de voleurs de juges que vous me feriez dire !

Tout le monde éclata de rire ; et le juge et le procureur eurent assez d’esprit pour faire comme tout le monde.

— Et voilà pourquoi, moi, Maurin, je vous condamne, mais vous vous en fichez pas mal ! C’est peut-être dommage. Vous autres, vous jugez avec vos livres à la main. À votre place, je jugerais avec ça et avec ça…

Ayant frappé énergiquement sur son front et sur sa poitrine, il ajouta :

— Je ne sais pas si je me fais bien comprendre !

Un nouvel éclat de rire général accueillit cette saillie un peu trop libre, et si le juge fit la grimace, du moins ne la laissa-t-il pas apercevoir.

Et déjà Maurin, excité par le succès, ajoutait encore :

— Et puis, en fin de compte, tant qu’un gouvernement protégera les Espagnols qui viennent tuer des veaux en France, devant le public, et qu’il les laissera donner au peuple des leçons de boucherie, et qu’il les applaudira à seule fin de faire les affaires des marchands d’alcool, qui choisissent nos députés, lesquels font nos lois, je calcule qu’il ne sera pas bien étonnant