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L’ILLUSTRE MAURIN

interrogea le juge d’instruction. Il ne me plaît guère.

— Ça ? c’est le fameux Maurin des Maures.

— Bigre ! dit le juge, c’est un homme dangereux !

— Lui ? c’est le plus honnête homme que je connaisse. Il est accusé d’un tas de prétendus méfaits dont chacun ne prouve que la droiture de ses sentiments. C’est le bon sens populaire en personne, cet homme-là, affirma M. Cabissol.

— Oh ! vous, au fond, maître Cabissol, vous êtes un révolutionnaire… un anarchiste.

— Il y a quelques bonnes idées dans toutes les sectes, mon cher juge !

Le soleil commençait à verser des flammes. Les mouchoirs blancs flottaient en couvre-nuques sous les chapeaux ; toute la troupe était en nage. On avait abattu à grand’peine trois lapins et quatre perdreaux, mais c’est Pastouré et Maurin qui les avaient tués.

— Messieurs, dit le procureur du roi de la République impériale, je ne suis pas depuis longtemps en Provence, mais je vois ce que c’est que votre Provence.

— Et qu’est-ce donc ?

— C’est un pays extrêmement chaud. Je refuse d’aller plus loin et je m’y refuserais, quand bien même vous me promettriez une pluie, un déluge de perdreaux, ce qu’on ne connaît certainement pas ici…

— Ma foi, dit le juge d’instruction, je sens l’insolation qui commence à me faire bouillir la cervelle.

— Vous avez si chaud que cela, monsieur ? dit Maurin, narquois.

— Je conviens, dit à son tour Labarterie, que cette partie de plaisir est pour moi une partie de souffrance.

Bref, tout le monde se déclara hors d’état de conti-