Page:Aicard - L’Illustre Maurin, 1908.djvu/369

Cette page a été validée par deux contributeurs.
351
L’ILLUSTRE MAURIN

sur la table du conseil municipal, au beau milieu du tapis bleu marine où sont brodées en rouge les armes de la ville, fut entourée par les deux fanfares et par le conseil municipal, maire en tête.

« En bas, sur la place, devant la fenêtre ouverte, la foule, tout Bourtoulaïgue, attendait.

« Trois jeunes fillettes, vêtues l’une de bleu, l’autre de blanc, la troisième de rouge, entrèrent dans la salle du conseil. La première ouvrit la cage dont elle attacha avec une ficelle la portette à ressort, de manière qu’elle restât ouverte, la seconde prit bien doucement le merle dans sa main, la troisième arrangea autour du cou de l’oiseau un petit ruban tricolore.

« Puis le merle fut remis dans la cage dont la porte toute ouverte était bien en face de la fenêtre grande ouverte également. Il se fit un gros silence… Le maire alors parut au balcon et dit au peuple :

« — Citoyens, aujourd’hui, jour glorieux où fut renversée la prison d’État qu’on appelait la Bastille, et pour honorer la naissance de nos libertés, mon merle va être rendu libre, lui aussi ! Déjà il porte les couleurs nationales qui ont fait le tour du monde sur l’aile de la Révolution. Il est encore dans sa cage, dans sa prison ; il n’attend pour s’envoler par cette fenêtre que les premiers accords de la Marseillaise… Répétez avec moi : « Vive le merle ! vive l’union ! vive la liberté ! »

« Les acclamations de tout un peuple entrèrent par la fenêtre, mais il faut croire qu’elles firent peur au merle, car il se rencoigna dans sa cage.

« Alors les deux chefs de musique battirent ensemble la mesure et la Marseillaise éclata avec un bruit terrible dans la salle qui était beaucoup étroite.