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L’ILLUSTRE MAURIN

— Quand je pense, dit-elle, — en regardant autour d’elle, d’un air colère, les quatre murs de la cabane de Saulnier, — quand je pense que tu as reçu ici cette Secourgeon ! et que, pour jouer un tour à Sandri, tu t’es fait surprendre avec une « serviciale » d’auberge !… Je ne sais pas comment j’ai fait pour accepter de te rejoindre dans cet endroit-ci. J’ai envie de tout prendre, tout ce qui s’y trouve, et de tout jeter dehors, puisque d’autres femmes sont pour toi venues ici !

— Garde-t’en bien, dit le mousquetaire, qui pour sa commodité s’était mis en bras de chemise et n’avait plus d’un mousquetaire que la culotte…

Son épée était accrochée à un clou par dessus son pourpoint, lequel était coiffé de son chapeau ; — et ses bottes évasées traînaient dans un coin, au pied de son tromblon debout et incliné contre le mur. Sa trompe de chasse ornait le dessus d’une méchante armoire…

— Songe que, excepté mes frusques de mousquetaire qui n’ont commis aucun péché et qui viennent de mes ancêtres, tout ici appartient à Saulnier… Il ne faut rien lui abîmer, pechère ! Il est si brave… quoique braconnier !

— Oui ! j’ai envie de m’en aller d’une maison où tu en as reçu d’autres, dit-elle, s’exaltant dans sa rancune contre des choses passées… Tout ici me fait horreur !

— Voilà bien la jalousie ! dit le mousquetaire qui s’assit en attirant la belle fille sur ses genoux. Ça n’a pas de bon sens. Voyons ! Pourquoi t’en prendrais-tu à des meubles ou à des murailles ? Il y aurait plus de raison à m’ôter la peau, car c’est elle qui est coupable, et après la peau ce qui est dessous, l’âme ou le cœur ! Enfin, la jalousie devrait tout détruire. Et si elle est,