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L’ILLUSTRE MAURIN

marcher à reculons jusqu’à la porte du toril qui s’ouvrit pour les laisser sortir… Mouredu Tortillados l’Espagnol, El Fuego Bardillas, le Six-Fournain de Madrid, directeur des jeux nationaux de Provence, avait disparu.

Aussitôt, comprenant d’instinct comment doit logiquement se terminer un spectacle à la fois si pénible et si burlesque, la foule, ivre de gaîté, de rage, d’ironie et d’indignation, de brutalité et d’esprit, se mit à démolir les gradins de bois et les palissades, et à en jeter les débris dans l’arène. Une baraque de buvetier était au dehors, toute proche… Un forcené courut y prendre des bidons d’alcool qui furent vidés sur les matériaux entassés au milieu du cirque… À ce bûcher qui était énorme, on mit le feu, et une farandole s’organisa autour de l’incendie.

Un monstrueux rondeau de moquerie et de colère commença à virer, ayant pour centre un obélisque de flammes rougeoyantes et de sombres fumées. Les femmes affolées s’étaient enfuies, suivies des « gens comme il faut »… et le sénateur Besagne disait à l’instituteur Letourel :

— Ça finit toujours comme ça : c’est décidément une mauvaise école que leurs corridas de muerte… Mais où sont donc les gardes champêtres ?

Les gardes champêtres étaient en train de se réjouir dans les buvettes environnantes.

Maurin, sans rire, disait à Pastouré qui l’avait rejoint :

— Ça commence à se faire vilain : allons chercher les gendarmes !…

Comme ils regagnaient à travers le tumulte l’arbre où étaient attachés leurs chevaux, ils passèrent près des buvettes ambulantes. Un ivrogne titubait, tendant