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L’ILLUSTRE MAURIN

courent aujourd’hui des taureaux et des toréadors espagnols.

Maurin redressa l’oreille :

— Comment, s’écria-t-il… espagnols ? Tu es sûr qu’ils sont espagnols ?

— Espagnols du moins ils s’appellent, sur les affiches que j’ai lues.

— Espagnols ! répéta Maurin, consterné.

Et, dans un grand élan d’indignation sincère :

— Voilà donc les Espagnols à la porte de Saint-Tropez ! à la Foux ! à Cogolin ! le jour même de cette bravade qui nous renouvelle à tous comment, il y a des siècles, nous avons mis en fuite, après trois heures de combat, vingt et une galères espagnoles ! Voilà donc maintenant que les barbiers espagnols viennent nous faire la barbe, le jour même de la bravade ! Des Espagnols faire leur fête à côté de la nôtre ! Ils versent sous nos yeux le sang des bêtes innocentes, pendant que nos tromblons ne tirent qu’à poudre et font les vantards !… Les Espagnols, je pense, se foutent de nous !

Il serra son tromblon avec colère dans sa main qui frémissait.

Il éperonna son cheval. Un enthousiasme montait dans sa cervelle surexcitée. Il ne fuyait plus, il allait à un péril nouveau, inconnu. Il tournait un dos méprisant à la guerre civile et courait sus à l’étranger !

— Je crois, dit Pastouré gravement, que nous n’avons rien à craindre, présentement, de ces Espagnols !

— Et qui te l’a dit ? riposta vivement le mousquetaire. Tu sais bien, Parlo-Soulet, que j’ai mené plusieurs fois des étalons du Golfe jusqu’en Camargue, chez un