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L’ILLUSTRE MAURIN

trouvait, était de suivre une tortueuse et longue sente de chèvre. Impossible de courir droit au fugitif.

Le coteau s’élevait par assises ; il semblait taillé en escalier ; une marche ici était formée de roches vives, là par des murs construits de main d’homme.

Les gendarmes n’hésitèrent pas, ils s’élancèrent sur le sentier grimpant qui s’attardait à contourner ravins et rochers, et la chasse commença.

Maurin ne perdait pas de vue les gendarmes. De temps en temps il se penchait par-dessus les « restanques » pour épier ses ennemis.

Une distraction lui fit perdre du terrain. La sente s’étant dédoublée, il avait pris une mauvaise direction et abouti à un cul-de-sac.

Quand il revint sur ses pas, au carrefour, il entendit, à vingt pas au-dessous de lui, l’un des gendarmes dire à l’autre :

— Presse-le vivement. Je connais l’endroit. Je le prendrai à revers. Nous l’aurons sur l’autre versant.

Maurin, retardé, se sentit perdu. Il lui fallait essayer de gagner ses ennemis de vitesse, et dans cette intention il fit trois pas encore, contourna un massif de kermès et, surpris, se trouva en présence d’un village d’abeilles.

Au milieu des pierrailles, et adossées au mur de roche, trente ruches, de simples troncs d’écorce de liège, étaient là, parmi les fleurs de thym et de romarin, cité ouvrière déjà bourdonnante.

Maurin se mit à rire silencieusement. Il saisit à pleins bras une des ruches, l’enleva, se pencha au bord de la roche à pic sous laquelle les gendarmes, prêts à se séparer, échangeaient un dernier conseil, et laissa tom-