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L’ILLUSTRE MAURIN

maisons trop riches, souvent les filles prennent l’habitude des beaux appartements et des belles frusques. Elles rêvent d’épouser des princes et meurent filles ou tournent mal… Tiens ! ajouta-t-il d’un air étonné, tu n’as même plus ces fanfreluches que tu avais chez ta première maîtresse, Mme Labroque. Ta robe est toute droite et ton tablier n’a plus de dentelle !

Mme la princesse est très simple, répondit Thérèse en pinçant un peu les lèvres pour paraître « comme il faut ».

— Et Mme la bourgeoise était très pavoisée, riposta Maurin. Je vois avec plaisir que tu as gagné au changement. Nos paysannes d’aujourd’hui, sur les grandes routes de nos villages, portent des robes-princesse qui traînent dans la poussière et des souliers découverts. Tandis qu’aux belles dames de Paris qui viennent se promener dans nos pays, on voit au contraire des robes courtes et des souliers solides. Les imbéciles portent leur orgueil aux pieds et sur le dos, et les gens de bon sens ont leur fierté dans leur esprit… Va de ma part voir ton calignaïré, petite ; je te rejoindrai tout à l’heure. Causez ensemble à volonté et convenez des choses.

Il voulut lui expliquer où elle trouverait Firmin, quel jardin il avait acheté… Mais elle savait tout, la mâtine !

Elle y alla et frappa à la porte de la petite maison. Ce fut Firmin lui-même qui lui ouvrit. Ils demeurèrent muets un moment, l’un devant l’autre, dans le cadre de la porte ouverte sur la mer.

Ils se regardaient d’un air étonné et tout bête, mais ravi. Ce fut lui qui rompit le silence :

— Et alors ? interrogea-t-il.