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L’ILLUSTRE MAURIN

salua de la main la troupe hostile et, se tournant vers ses amis les plus rapprochés de lui, il prononça, tranquille, de l’air d’un ambitieux satisfait qu’effleure enfin le premier rayon d’une gloire longtemps attendue :

— Eh bé ! té, ze suis content ! Ze vois que ze commence à devenir un type !

Ceci dit, il enfonça ses deux mains dans les larges goussets de son gilet bedonnant, sur lequel s’étalait une chaîne d’or d’une grosseur surnaturelle, et il alla, d’une démarche digne, se mêler à un groupe de politiciens en train de discuter violemment… Il faut croire que la querelle l’intéressait, car il ne tarda guère à y prendre une part active…

Cependant les deux gendarmes étaient toujours captifs de la foule. Vainement ils essayaient de se dégager, ils n’y parvenaient point, et on les plaisantait ferme :

— Nous sommes chez nous, gendarmes !… Vous êtes entrés sans carte, qué ? vous n’aviez pas le droit… Ceux qui n’ont pas de cartes à l’entrée doivent sortir les derniers… c’est le règlement !

Et le flot toujours reformé leur coupant toujours la route, ils hésitaient à le rompre de vive force, incertains en effet de leur droit en pareille aventure.

Les groupes du dehors se ressoudaient par moments, venaient de nouveau barrer la sortie.

Ceux qui n’étaient pas du complot restaient par curiosité.

Et les conversations faisaient un bourdonnement au-dessus duquel ne s’entendaient que des répliques sans aucun rapport entre elles ;

— Il paraît que sa femme est beaucoup fatiguée : elle ne passera pas la nuit !