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L’ILLUSTRE MAURIN

justice peuvent faire de la prison préventive une vraie torture, et le mandat d’arrêt peut être une véritable lettre de cachet. Après plus de trente ans d’existence, la République n’a pas songé à changer cela !

— Si ça changeait, ce n’est pas moi qui m’en plaindrais, dit Maurin.

— Un autre mal appelle l’attention du législateur. Pendant que l’école primaire laisse l’enfant libre ; pendant que sa famille, encore mal éclairée sur les bienfaits de l’instruction, non seulement ne prête aucun secours à l’instituteur, mais encore le disqualifie aux yeux des écoliers en donnant quotidiennement raison à l’enfant contre le maître, — pendant ce temps-là l’internat dans les lycées continue (malgré que des progrès y aient été accomplis) à faire du petit bourgeois un homme à genoux devant l’autorité quelle qu’elle soit, et prêt par conséquent à devenir lui-même un autoritaire sans initiative et par suite sans humanité !

« Cet état de choses anime l’une contre l’autre les classes ouvrière et bourgeoise que l’instruction devrait rapprocher. Il est essentiellement contraire au progrès national et humain.

« Pendant que l’école primaire est impuissante à apprendre aux enfants du prolétaire la discipline du devoir, le lycée apprend au fils des bourgeois qu’il aura à subir ou à exercer une autorité de fonctionnaire, sans l’éclairer sur les véritables besoins populaires qui se peuvent résumer en quatre mots : « toujours plus de justice ! » La France républicaine en est encore à souffrir d’une profonde maladie chronique : le césarisme, tandis que l’essence de la République est de ne reconnaître d’autorité que celle des lois.