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Et en Écossais ? — Non ! — Voilà du nouveau et voici une drôle de justice qui, mise au pied du mur, forcée par la logique, en arrive à se prononcer entre la Turquie et l’Écosse au risque d’amener des complications et de troubler sur ses assises l’équilibre européen ! — Le substitut : C’est bon ! Assez ! Cela suffit ! Je vous vois venir avec vos gros sabots, vos histoires de deux sous et de jupe écossaise qui se soulève sous les courants d’air… Vous êtes venu ici pour vous moquer du monde ! — La Brige : Du monde, non, mais de la Loi qui a bien tort de crier au scandale quand un bon garçon comme moi se borne à la châtier en riant. Gare, si un jour les gens nerveux s’en mêlent ! Lassés de n’avoir pour les défendre contre les hommes sans justice qu’une Justice sans équité, éternellement préoccupée de ménager les vauriens et toujours prête à immoler le bon droit en holocauste au droit légal dont elle est la servante à gages »…

Nous pourrions encore citer quelques procès de La Brige ou quelques circonstances de sa vie où sa déséquilibration et son caractère processif se manifestent ouvertement, mais nous en avons assez dit pour démontrer et illustrer le caractère propre du processif à jet continu.

L’observation que nous allons voir maintenant est celle d’un persécuté-persécuteur à l’état latent, dont la déséquilibration revêt un caractère pour ainsi dire professionnel, et se manifeste surtout par la méfiance, l’orgueil et la susceptibilité.

Le gendarme Labourbourax[1] tient le tribunal d’Écoute-s’il-Pleut exclusivement occupé du règlement de ses petits griefs ; la Chambre correctionnelle n’entend parler que de ses malheurs. Sa manie est facilitée, comme fouettée par l’exercice de ses fonctions de gendarme. Un jour il demande douze condamnations pour outrage à un agent de la force publique dans l’exercice de ses

  1. G. Courteline : Le Gendarme est sans pitié (Modern-Théatre).