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qu’à la gauche. Il donna l’ordre au maréchal des logis : « à partir d’aujourd’hui, il ne bougera plus de l’écurie… Quand vous descendrez de semaine, vous le passerez en consigne à votre successeur en lui disant de le passer au sien, et comme ça… jusqu’à la gauche !!! » Pendant trente-cinq jours d’affilée, le bleu conserva la garde de l’écurie, vivant là, couchant là, ne sortant que quelques instants dans la journée, le temps de courir se chercher une croûte. Mais, les plus belles choses ayant le pire destin, il se fatigua, et le matin du trente-sixième jour, il attendit son capitaine dans la cour et, bravement, lui demanda de relever sa punition. Marjalet, comme bien l’on pense, n’avait pas le moindre souvenir de la punition ni des circonstances dans lesquelles elle avait été imposée. Aussi son sang ne fit-il qu’un tour, et le sous-officier de semaine, pour avoir suivi la consigne et laissé le bleu garde d’écurie jusqu’à la gauche, attrapa-t-il huit jours de boîte !

Au physique, Marjalet était un gros homme, court, gras, “ mais de cet embonpoint qui dénote aux yeux de l’observateur, une mauvaise santé ”[1], son teint est blafard ; au repos, il offre une expression d’hébétude, l’œil en dedans, en proie à une vague somnolence, mais dès que le moindre incident réveille son irritabilité morbide, sa peau se colore, ses joues tremblent, son nez devient écarlate, ses jambes vacillent. C’est bien là la description de l’alcoolique chronique. Au point de vue intellectuel, il est plongé dans une hébétude, dans une sorte de torpeur ; sa mémoire, sa volonté sont diminuées ; il ne songe plus qu’à une chose et ne jouit plus que d’une chose : l’alcool.


II. Délire dans les traumatismes.


À côté du délire alcoolique il convient de placer le délire des traumatismes, qui s’en rapproche un peu, par certains côtés.

  1. B. Ball : Leçons sur les maladies mentales.