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174 LE PRIMTEMS DU SIEUR D'AUBIGNÉ.

Donnant l’ame & la congnoissance
Mesme aux choses qui n’en ont point.

Ainsi vos beaux tretz s’acroissans

Vous feront suivre puis aprés
Aux mons, aux rocz & aux forestz.
Aux flotz & aux vens fremissans.
Mais voiez vous encor la mouche
Qui m’enbrasant pour son plaisir,
S’est reposé sur vostre bouche.
Donnant jalouzie & dezir.

Ha ! ma Diane, je me plains

De ce que trop vous supportez :
Où sont ces affligeantes mains
Qui punissent mes privautez ?
Pourquoy ne bruslez-vous son aesle,
Si ce n’est que vous aimez mieux
Ce feu là pour moy que pour elle,
Ce feu bruslant de voz beaux yeux ?

Je croy' que voiant arriver

Le froid qui lui donne la mort,
Elle pense bastir un fort
Sur vostre sein pour son yver :
Pour Dieu, chasssez-la, ma mignonne.
Pour Dieu, mignonne, chaffez-la,
Ou je meurs si on ne me donne
Autant de crédit que cela.

Ou bien sans vous y amuser,

II me semble qu’il sera mieux.
Si vous fermiez un peu les yeux,
Que je la chasse d un baizer.
Je sers bien plus à vostre gloire
Que la mouche à vostre grandeur,
Car je vous fais avoir vicìoire
Du temps, elle d’une couleur.