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ODES 169.

Et qui ne peut desnier
Ses fruitz à son jardinier.
Là florissent entassees
Mille bizarres pensees,
Qui de nuantes couleurs
Naissent de mesmes humeurs,
Là les incarnattes roses
Ouvrent leurs beautez descloses,
Là florissent les oeilletz
Cramoisis & vermeilletz,
Là prend acroiffance & vie
La violette, encholie,
Marjolenne, tims, persilz,
Les romarins, les soucilz,
L’aspic et les violettes,
Et les pommes d’amourettes,
Et l'herbe qui au soleil
Tourne & retourne son oeil.
Mais tu n’as rien de sauvage,
Petit jardin mon ouvrage,
Tu as de toute façon
De salades, le creson,
Serfeuil, laithuez pommees,
Pimprenelles, sicourees.
Il n’y a, comme je croy.
Plaisir qui ne soit en toy,
Petit jardin qui arroses
Tes groseliers & les rozes
De ce petit ruisselet
Murmurant, argentelet,
De ceste unde cristaline
Qui trotte, fuit & chemine
Et s’eschappe entre les fleurs,
Et aroze les couleurs