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121 ODES.

La vie longue & languissante
Que le malheur fait si dolente
Par faute de savoir mourir.

Celuy qui dit que ceste rage

Qui arme les sanglantes mains
Encontre ses membres germains
Est une faute de courage,
Voulant mespriser [en] autruy
Ce qu’il ne sait n’auseroit faire,
II descouvre par le contraire
Ce qui n'a garde d’estre en luy.

Or est-il [pas] temps que je face

Ma vie & mon mal consommer.
Qu’ensemble je face fumer
Ma peine & mon sang par la place ?
Un coup fera ternir mes yeux
Tarira ma sueur & parole,
Car c’est ainsi, ainsi que vole
L’esprit de Diane aux bas-lieux.
II.

Autant de fois comme j’essaie

D’apaiser le sang de ma plaie,
Mon sang bouillant de mille endroitz
Boult & s’eschauffe autant de fois.
Mais aussi lors que j’ay envie,
Sans languir d’esteindre ma vie,
La sauver des feuz des amours,
Mon sang se rapaise tousjours.

Volunté dure & impuissante

Soubz le pouvoir qui me tormente,
Trahissant, mutinant mon cueur,