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tudes, des besoins et des tendances qui composent et compliquent la civilisation moderne.

Monseigneur, vous avez l’âme trop généreuse pour que cette vérité la blesse. Auguste et infortuné représentant de la plus ancienne race et de la plus illustre monarchie de l’Europe, si vous n’avez point de rôle actif et politique dans les temps nouveaux, une grandeur historique, et je dirai poétique, vous est réservée, qui peut satisfaire le plus haut orgueil. Vous l’avez compris ainsi ; j’en ai pour preuve et pour garant la dignité constante de votre attitude. Plus heureux que tant d’autres, vous avez forcé à l’estime les ennemis de votre maison. Tous regardent respectueusement les traditions anciennes s’éteindre avec dignité, avec douceur, dans votre noble silence. L’histoire aura pour vous une page attendrie ; la muse austère n’aura pas un blâme pour votre personne.

Dieu vous garde, Monseigneur, d’écouter jamais d’autres conseils que ceux de la voix intime qui parle au dedans de vous. Si je me permets d’y joindre un moment la mienne, ce n’est pas pour vous prémunir contre vous-même, mais contre des devoûmens auxquels votre jeunesse accorde peut-être une déférence trop grande, J’ai besoin de le répéter en finissant, s’il y avait autour de vous, Prince, des ambitions et des espérances téméraires, votre patriotisme mieux informé ne tarderait pas à en faire justice ; la droiture de vos instincts repousserait des suggestions contraires à cette sagesse parfaite et cette résignation religieuse dont vous avez jusqu’ici donné l’exemple.