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hasardais à parler d’une révolution prochaine, terrible et sanglante dans l’Etat germanique.

Couvée longtemps dans des profondeurs inaccessibles à nos regards dédaigneux et distraits, la révolution allemande éclate enfin sur toute l’étendue du territoire, étreignant simultanément tous les problèmes que nous avons tranchés un à un ; mettant aux prises, dans une épouvantable mêlée, race contre race, secte contre secte, classe contre classe, monarchie contre république, féodalité contre communisme.

Vous comprendrez combien, à mes yeux, la lutte est complexe, acharnée, et peu voisine d’une solution, si je vous dis que l’établissement d’une république démocratique et fédératives des États-Unis d’Allemagne peut seul y mettre fin. Jusque-là, et Dieu sait quelles années calamiteuses vont passer auparavant sur les générations vouées au sacrifice, nous verrons les ruines s’entasser sur les ruines, les cadavres sur les cadavres ; le vertige s’emparer de toutes les têtes et précipiter vaincus et vainqueurs dans un commun abîme.

L’unité, telle est la tendance des classes éclairées et le besoin confus des masses en Allemagne, depuis bientôt un quart de siècle.

Le parlement de Francfort et l’étrange restauration entreprise par lui d’un empire romain sont l’expression énigmatique de ce besoin très général mais très vague encore. Cette première formule unitaire, précisément par ce qu’elle présentait de vague, parut rallier au début les opinions et les intérêts opposés. On vit avec surprise Frédéric-Guillaume IV, vivement blessé pourtant par l’élection d’un archiduc autrichien, arborer les couleurs allemandes, dans l’espérance sans doute que, protégé par le drapeau national, il se sentirait plus fort contre la démocratie prussienne.

De son côté, le parti radical applaudissait à un essai d’unité monarchique qui, selon lui, frayait les voix à l’unité républicaine ; mais l’accord fut de courte durée.

L’Assemblée de Francfort où dominait ce parti mixte si funeste dans les temps révolutionnaires, qui veut et ne veut