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XVI.

AU PEUPLE-ÉLECTEUR.



9 novembre.

L’heure approche. Elle est grave et solennelle. Pour la première fois, dans l’histoire du monde européen, une nation grande par l’étendue de son territoire, grande surtout par la noblesse de ses origines, la gloire de ses annales et l’importance du rôle qu’elle a joué toujours dans les destinées de la civilisation, la France se voit appelée à élire, selon le mode le plus radical qui ait jamais été pratiqué, le magistrat suprême auquel elle entend confier la garde et le soin de la chose publique.

Une telle heure n’a rien dans le passé qui l’égale ; rien, à coup sûr, dans l’avenir, n’en saurait effacer la mémoire, car elle ouvre une ère entièrement nouvelle ; elle marque le premier acte décisif de la souveraineté populaire, constituée dans son extension la plus étendue, appliquée dans sa concentration la plus expressive.

Sous l’œil jaloux des dynasties et des aristocraties européennes dont nous avons bravé les colères, en présence des héros, des confesseurs, des martyrs de la liberté qui attendent de nous la glorification ou la confusion de leur foi, la démocratie française va porter témoignage pour ou contre elle-même, donner la mesure et livrer le secret de sa force ou de sa faiblesse. Par un nom propre, elle va personnifier ses principes, rendre sensible le caractère qu’elle assigne à