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et discourait bien de toute chose. » Sa taille, au-dessus de la moyenne, était bien proportionnée ; son œil d’un brun clair, grand et à fleur de tête, répandait une lumière tranquille sur son visage ; son front vaste, que la guerre et la politique rendirent chauve avant le temps, son nez long, un peu gros, sa barbe épaisse et brune, sa bouche bien formée, tout en lui annonçait la force, la droiture et la douceur. Son tempérament robuste l’inclinait aux voluptés ; l’intimité des femmes lui était nécessaire, et l’on sait combien il savait se faire aimer d’elles ; les honneurs dont il combla son fils naturel, Justin de Nassau, montrent aussi qu’il ne reniait pas les entrainements de l’amour, bien qu’il se fût imposé de les contenir. Pendant longtemps, il ne put se faire au ton morose et à la rigidité puritaine des sectateurs de Calvin. Son affabilité, la simplicité de son accueil, jointes à son air noble, lui avaient acquis une popularité inouïe. Mille traits véritables, mille anecdotes qui tournaient en légendes, passaient incessamment de bouche en bouche, et portaient jusqu’à la folie l’amour du peuple pour le père Guillaume. Toujours vêtu sans aucun faste, « à sa mode qui était de n’en avoir point[1] », il se plaisait, le plus souvent, à aller par les rues sans chapeau, pour s’épargner le soin de se découvrir à chaque salut qu’il recevait ; s’arrêtant lorsqu’il en était requis pour faire raison aux artisans et aux bateliers,

  1. La Pise.