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d’un mois à en faire les apprêts. Pendant tout ce temps, le corps de Guillaume reposa sur un lit funèbre, autour duquel vinrent incessamment s’agenouiller et pleurer un nombre infini de personnes. Les médecins qui avaient ouvert le corps augmentèrent, s’il était possible, les regrets publics, en déclarant que le prince d’Orange était d’une complexion si saine et robuste, que, sans ce coup fatal qui avait traversé le cœur, il serait parvenu, selon les vues de la nature, à un âge très-avancé. Guillaume, en effet, pendant tout le cours d’une vie exposée à des fatigues, à des périls, à des chagrins toujours renaissants, n’avait été malade qu’une seule fois, en 1574, « au danger de Leyde[1] » il avait failli mourir de l’extrême anxiété qu’il ressentit pendant plusieurs jours, où il crut la ville perdue sans ressources.

Le vendredi 3 août, Guillaume de Nassau fut conduit à sa dernière demeure. Environ douze cents bourgeois en armes ouvraient le cortège funèbre ; puis venaient la maison du prince, huit chevaux couverts de housses en drap noir aux écussons de ses huit principales seigneuries dont les bannières suivaient en ordre. Le cheval de bataille, magnifiquement harnaché, marchait seul, tenu par un écuyer ; l’épée nue de Guillaume était portée par le comte d’Overstein ; la couronne, par le baron de Créange. En l’absence de Philippe-Guillaume, fils aine du prince, qui languissait en Espagne, le deuil

  1. Groen van Prinsterer, t. V, p.40.